Il y a quelques jours, lors du tournoi WTA 1000 de Guadalajara, elle a perdu sèchement, sans inscrire le moindre jeu. En effet, Kristina Mladenovic (n°206) n’en finit plus de s’enfoncer, elle qui fut l’un des deux grands espoirs du tennis féminin français. À 30 ans, elle a atteint le point le plus critique de sa carrière, avec une chute qui conserve une part de mystère…
En moins d’une heure, elle a pris un cinglant 6-0, 6-0. C’était la semaine dernière, lors du premier tour du tournoi WTA 1000 de Guadalajara, face à l’espagnole Cristina Bucsa (n°79). Le constat était sans appel : même si elle participait au tableau final d’un WTA 1000 pour la première fois depuis bien longtemps, Kristina Mladenovic (n°206) n’avait pas le niveau requis. Quatre mois après sa dernière apparition dans un grand tableau sur le circuit, à Roland-Garros (où elle s’était déjà inclinée d’entrée), rien n’a donc changé pour la joueuse française. La situation a même empiré. Elle est désormais au-delà du Top 200 au classement WTA, des profondeurs qu’elle n’avait plus côtoyées depuis ses 18 ans. Comment celle qui devait porter le tennis féminin tricolore (avec Caroline Garcia) en est arrivée là ? Si la trajectoire actuelle de Kristina Mladenovic interpelle, c’est que sa première partie de carrière était prometteuse. Elle est entrée dans le Top 100 en septembre 2012, à l’âge de 19 ans, avec une progression régulière, pour s’installer dans le Top 50 en 2015-2016, avant de franchir un cap majeur en 2017. Titrée pour la première (et seule) fois de sa carrière sur le circuit à Saint-Pétersbourg, elle avait alors enchaîné plusieurs finales (Acapulco, Stuttgart et Madrid) avant d’atteindre les quarts de finale à Roland-Garros, sortant au passage la tenante du titre, Garbiñe Muguruza. Du haut de son mètre 84, la Nordiste impressionnait tant par sa puissance au service et en coup droit que par sa capacité à varier et à prendre le filet.
Cependant, dès l’été, le soufflet retombe. Une dernière victoire au premier tour à Washington et… c’est tout ! Elle ne gagnera plus un match jusqu’à la fin de saison. La série noire se prolonge même jusqu’en février 2018, soit sept mois de disette. Kristina Mladenovic stoppe l’hémorragie à 15 défaites d’affilée à… Saint-Pétersbourg, où tout avait commencé un an plus tôt. Sans être catastrophique, la suite de l’année n’est pas à la hauteur des espoirs suscités. La Française termine la saison à une 44ème place mondiale presque anonyme : elle est rentrée dans le rang. Heureusement que Kristina Mladenovic se révèle en double, mais c’est l’arbre qui cache la forêt. Ceci dit, elle se construit un palmarès prestigieux dans la discipline, avec sa compatriote Caroline Garcia mais aussi son amie Timea Babos. Début 2019, son sacre à l’Open d’Australie (son troisième en Grand Chelem) avec la Hongroise la relance. Pour solidifier son niveau moyen et retrouver des ambitions en simple, elle décide d’engager Sascha Bajin comme entraîneur (il vient de se séparer de Naomi Osaka, avec laquelle il a conquis un deuxième Majeur à Melbourne). Globalement, la collaboration fonctionne : malgré des échecs précoces en Grand Chelem, Kristina Mladenovic remonte à la 39ème place mondiale et finit l’année avec deux demi-finales consécutives (Zhengzhou et Moscou). Elle bat surtout cinq membres du Top 10, dont deux n°1 mondiales (Naomi Osaka à Dubaï et Ashleigh Barty en finale de Fed Cup). Elle permet notamment à la France de remporter la Fed Cup pour la première fois depuis 2003.

Mais encore une fois, alors qu’on pense qu’elle ça se relancer, c’est la rechute. Côté vie privée, son idylle avec Dominic Thiem se termine et son coach décide unilatéralement d’arrêter de travailler avec elle pour s’occuper de l’Ukrainienne Dayana Yastremska. À peine posées, les fondations sont ébranlées pour l’exercice 2020. Et comme si cela ne suffisait pas, la pandémie de Covid-19 éclate. Battue au deuxième tour de l’US Open après avoir mené 6-1, 5-1 et obtenu quatre balles de match, Kristina Mladenovic accuse le coup. « Je suis à bout », déclare-t-elle à propos des restrictions sanitaires mises en place par l’USTA. « C’est un cauchemar ce qu’on vit là. Je n’ai qu’une seule envie, c’est retrouver ma liberté. C’est absolument abominable comment ils nous traitent. » En 2021, malgré un troisième tour à l’Open d’Australie (son meilleur résultat en Grand Chelem depuis Wimbledon 2018), elle replonge à la 92ème place mondiale. Le cercle vicieux est difficile à arrêter. En 2022, de fréquents problèmes sur le plan physique se sont ajoutés à l’équation, notamment à l’épaule, ce qui n’a pas aidé à fixer un service continuellement en chantier et ses hémorragies de doubles fautes. Seule éclaircie : son sixième et dernier titre en Grand Chelem en double, avec Caroline Garcia, devant le public français à Roland-Garros. En simple, la dégringolade s’est poursuivie. Et ces deux dernières saisons, la Nordiste a surtout joué sur le circuit secondaire (12 tournois ITF en 2022, 9 en 2023) à cause de son classement. En 2023, même en double, son classement est en chute libre (70ème cette semaine, alors qu’elle était n°1 mondiale en 2021). Alors, à 30 ans, comment se relancer ? Il est peut-être enfin temps de faire un choix, entre simple et double, car Kristina Mladenovic a besoin d’un cap, de structure et d’un coach en qui elle ait confiance pour redevenir la joueuse qu’elle a été.
Article rédigé par Yannick Giammona
Crédit photos : @FFTennis
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