Vous vous demandez peut-être quelles sont les particularités du métier de cordeur. Marco Rossani, professionnel italien, a partagé son expérience, lui qui s’est occupé des raquettes des huit meilleurs joueurs mondiaux durant les ATP Finals de Turin. Cet Italien passionné a ainsi évoqué les exigences des joueurs mais il a également parlé de leur matériel et du rythme imposé à ces hommes de l’ombre au cours d’un tournoi.
Durant les ATP Finals disputés à Turin la semaine dernière, nos confrères du site italien Ubitennis se sont intéressés au cordage. Ainsi, ils sont allés à la rencontre de Marco Rossani, qui est le chef d’équipe de la Wilson Italia Stringing Team, cordeur officiel de ces Masters depuis qu’ils ont déménagé à Turin en 2021. Marco Rossani est ainsi cordeur professionnel depuis 39 ans et il a participé à de nombreux tournois nationaux et internationaux, comme Wimbledon. Au cours de son interview, il a notamment expliqué que les joueurs de double sont en réalité plus exigeants que ceux évoluant en simple. « Rublev est sans aucun doute le plus pointilleux cette année, car comme nous l’avons tous vu pendant les matchs, ce n’est pas une période facile sur le plan émotionnel pour lui », a-t-il déclaré. « Il demande beaucoup de raquettes, toutes décalées. Il veut qu’elles soient cordées le plus tard possible, toujours le même jour, près du match. Rune est également très exigeant, il a apporté sept raquettes et veut de nombreuses tensions différentes. Alcaraz est celui qui crée le moins de problèmes, il est le plus détendu de tous, dans le sens où il apporte les raquettes et nous dit vraiment de les faire quand nous voulons. Mais les joueurs de double sont certainement les plus compliqués, notamment Matthew Ebden, que je connais depuis de nombreuses années maintenant et qui a besoin de raquettes déformées de manière contrôlée. Il n’est pas rare qu’il prenne une raquette fraîchement cordée et qu’il coupe le cordage, demandant à ce qu’elle soit refaite. Il n’en veut pas au cordeur, il est conscient qu’il est très difficile de recréer exactement ce qu’il veut, on parle vraiment d’un demi‐millimètre de longueur. »

Marco Rossani a également abordé le sujet des modifications apportées aux raquettes. On le sait, les joueurs jouent très rarement avec les modèles grands publics que l’on trouve dans n’importe quel magasin de sport. Ils apportent toujours quelques modifications, notamment sur le poids de la raquette, en y posant des bandes de plomb. Et d’après le cordeur, l’outil de Carlos Alcaraz (n°2) ne possède absolument aucune modification, ce qui est rare pour un joueur professionnel. « C’est la question que l’on m’a souvent posée au fil des ans », a ainsi confié cet Italien. « Et je donne toujours la même réponse : est‐il plausible de penser que je peux entrer chez un concessionnaire et acheter un vélo qui, même s’il est sportif, est le même qu’un vélo de course que vous utilisez sur le circuit ? Bien entendu, ce n’est pas le cas. Il s’agit de raquettes conçues pour des joueurs et sur lesquelles sont apposés des graphismes commerciaux. Il est clair que le remplissage est toujours différent, en fonction des besoins du joueur. Alcaraz est le seul des huit finalistes à utiliser une raquette absolument non modifiée. J’ai également eu l’occasion de l’examiner de l’intérieur et elle est exempte de ruban de plomb, de silicone, donc apparemment exempte de toute modification. » Marco Rossani s’est également penché sur la raquette utilisée par le vainqueur des ATP Finals, Novak Djokovic (n°1). « Nous ne cordons pas pour Djokovic parce qu’il a un service extérieur privé, mais au fil des ans, j’ai eu l’occasion de corder ses raquettes dans d’autres contextes, par exemple à Wimbledon », a-t-il expliqué. « Sa raquette est particulièrement personnalisée. Il y a beaucoup de plomb, c’est certainement l’une des plus étranges que l’on puisse voir chez les joueurs. Alors qu’ici à Turin, parmi les raquettes que j’ai vues, je n’ai pas remarqué de bizarreries particulières, notamment parce que la tendance est de les rendre aussi légères que possible. »

En ce qui concerne le rythme de ces hommes de l’ombre durant un tournoi, il faut savoir que Marco Rossani et son équipe étaient parmi les premiers arrivés sur le site, le matin, et certainement parmi les derniers à abandonner le navire. Selon la réglementation, à la fin d’un match, ils doivent attendre au moins une demi-heure avant de pouvoir quitter les lieux, au cas où un joueur programmé en derniere rotation vienne leur porter une raquette à corder. Cela peut donc faire de grosses journées, notamment quand un joueur termine un match à 2h du matin et doit s’entraîner tôt le lendemain matin. Ses raquettes devront être prêtes. Mais avant de passer à la salle de cordage, il y a la conférence de presse, le massage d’après-match et d’autres procédures à accomplir. Dans ce cas, les raquettes sont parfois portées vers 3 ou 4 heures du matin. Les exigences des joueurs sont nombreuses et varient toujours en fonction du tournoi. Voilà pourquoi il est intéressant d’évoquer ce métier essentiel pour les joueurs, mais exigeant pour les hommes qui le pratiquent.
Article rédigé par Yannick Giammona
Crédit photos : @RossaniMarco
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