Depuis 2020, l’Open d’Australie ainsi que l’US Open ont opté pour un changement de surface. Ainsi, les deux tournois du Grand Chelem disputés sur dur ont ralenti le jeu, tout comme Wimbledon l’avait fait au début des années 2000. Voilà des choix qui ont interpellé, relançant le vieux débat sur la vitesse du jeu et la diversitéentre joueurs de fond de court et serveurs-volleyeurs.
Il y a un peu plus de deux ans, en 2020, l’US Open faisait peau neuve en modifiant sa surface, inchangée depuis 42 ans. Adieu le Decoturf, utilisé depuis 1978, et place à une nouvelle surface dure, le Laykold, utilisée à Miami depuis 1984 et plus lente. Officiellement, ce changement était justifié par l’idée de faire jouer la concurrence, avec une nouvelle société – celle qui fabrique ce fameux Laykold – qui avait remporté l’appel d’offres. D’ailleurs, cette nouvelle surface en dur proposait les meilleures garanties environnementales. Cependant, l’argument écologique ne pouvait, à lui seul, expliquer complètement ce choix. Selon nos confrères d’Eurosport, qui avaient enquêté en 2020, un autre argument était à prendre en considération : la qualité de la surface, soumise à l’humidité et à de fortes variations de températures. L’exemple de l’édition 2011 de l’US Open, largement perturbée par la pluie, est probante. À l’époque, le Decoturf avait souffert et une flaque d’eau stagnante sur le Stadium Louis-Armstrong avait contraint Andy Roddick et David Ferrer à s’exiler sur le Court 13 pour jouer leur rencontre comptant pour les huitièmes de finale. Le Laykold, plus résistant et protégeant contre la moisissure due à l’humidité – d’où le choix de cette surface pour le Masters 1000 de Miami – a donc été adopté en 2020. L’Open d’Australie a également changé de surface, la même année, passant du Rebond Ace au Greenset. Là encore, une surface plus lente avec un constat unanime parmi les joueurs depuis 2020. La vitesse des courts à Melbourne et New York est donc très proche, participant ainsi à un ralentissement global des surfaces opéré depuis plus de 20 ans.
Ainsi, l’exemple de Wimbledon commence à etre connu par tous les fans de tennis. En 2001, les membres du All England Club avaient opté pour un autre type de gazon, censé résister plus longtemps au traitement que lui infligeaient les joueurs et aux gabarits de plus en plus impressionnants. Cette nouvelle herbe avait entraîné une modification de la trajectoire des balles avec notamment un rebond plus haut. Conséquence : le jeu au filet et l’enchaînement service-volée en ont payé le prix. Pire, la finale de 2002, entre Lleyton Hewitt et David Nalbandian, n’a donné lieu à aucun service-volée. Du jamais vu au sein du temple du tennis (d’attaque). Désormais, on se retrouve donc avec quatre tournois du Grand Chelem très proches en terme de vitesse de jeu, tant et si bien que le gazon de Wimbledon est plus attaqué en fond de court que dans les carrés de service à la fin du tournoi. Et c’est aussi grâce à ce phénomène que des joueurs comme Roger Federer, Rafael Nadal ou encore Novak Djokovic ont pu s’imposer aux quatre coins du monde et exploser le compteur de leurs victoires en Grand Chelem (respectivement 20, 22 et 21 à ce jour). Notez que certaines surfaces réputées plus dangereuse, comme la moquette, ont été abandonnées pour préserver l’intégrité physique des joueurs et réduire le risque de blessures.

Dès les années 2000, certains joueurs comme Roger Federer ont commencé à se plaindre du ralentissement des surfaces. Battu deux fois consécutivement en 2007 sur les durs très lents d’Indian Wells et de Miami par l’Argentin Guillermo Canas, pourtant spécialiste de terre battue, le Suisse s’était agacé de la tendance à l’homogénéisation des conditions de jeu. Pourtant, il a su en profiter, puisqu’il a adapté son style de jeu offensif en acceptant l’échange du fond du court. Même le directeur du Masters 1000 de Montréal, Eugène Lapierre, ne s’est pas caché d’avoir ralenti la surface pour qu’elle plaise à Rafael Nadal (n°2), qui s’est imposé plusieurs fois au Canada. Cependant, il est bon de remarquer que les serveurs-volleyeurs, avec ce ralentissement des surfaces, ont progressivement disparu. Pourtant, en 2010, certains directeurs de tournois – à l’instar de Jean-François Caujolle au Masters 1000 de Paris-Bercy – ont opté pour l’inverse, c’est-à-dire une surface beaucoup plus rapide. Cette année-là, les spectateurs en ont d’ailleurs été ravis ! À l’époque, Gaël Monfils avait éliminé Roger Federer dans une demi-finale mémorable (en sauvant plusieurs balles de match) et Michaël Llodra s’était lui aussi frayé un chemin jusqu’en demies, s’offrant au passage Novak Djokovic en huitièmes de finale. En Grand Chelem, seul l’Open d’Australie avait osé, en 2017, accélérer ses courts. Au-delà du come-back spectaculaire de Roger Federer après six mois d’arrêt, le tennis y avait été d’une grande qualité tout au long de la quinzaine, la demi-finale entre Rafael Nadal et Grigor Dimitrov atteignant des sommets. Mais comme nous l’avons déjà évoqué, l’Open d’Australie à depuis fait machine arrière, comme jadis Wimbledon et depuis 2020 l’US Open. Ainsi, la tendance au ralentissement du jeu est bie réelle et incontestable, que ce soit en raison des surfaces ou même des balles. On se demande alors si la diversité des styles de jeu n’aiderait pas à attirer de nouveaux fans pour ce sport qui nous tient tant à cœur.
Article rédigé par Yannick Giammona
Crédit photos : @BTCxTennis, @TennisAustralia
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2 réflexions au sujet de “De Melbourne à New York en passant par Wimbledon : l’uniformisation des surfaces va-t-elle tuer l’intérêt du tennis ?”