En Europe, sur la planète tennis, printemps est synonyme de tournée sur terre battue et de Roland-Garros. Pourtant, certains joueurs, à l’instar d’Andy Murray (n°84) et de Nick Kyrgios (n°94), détestent réellement cette période de l’année. Allant jusqu’à renoncer de disputer les tournois les plus importants sur cette surface. Pourquoi un tel choix ?
En 2022, nous ne verrons pas Andy Murray (n°84) sur la terre battue européenne. Ni Nick Kyrgios (n°94), même s’il dispute actuellement le tournoi ATP 250 de Houston, sur ocre, où il jouera les demi-finales ce samedi. L’Ecossais préfère ainsi garder ses chaussures et ses chaussettes propres et se réserver pour Wimbledon, à domicile. A 34 ans, l’ancien n°1 mondial peut s’offrir le luxe de faire ce choix et de manquer trois Masters 1000 (Monte-Carlo, Madrid et Rome) et un tournoi du Grand Chelem (Roland-Garros). Il n’a plus rien à prouver. « Ces dernières années, la terre battue a rendu les choses pires pour moi, je ne veux pas prendre de risques », a-t-il expliqué à la BBC en février dernier pour justifier son choix. « Je ne dis pas que je ne jouerai plus jamais sur terre battue, mais l’an dernier ça m’a presque fait manquer Wimbledon et j’ai failli ne pas pouvoir jouer la saison sur gazon. » D’autres joueurs vont également manquer la saison sur ocre, comme Nick Kyrgios, donc. Qui fait également ce choix parce qu’il déteste la terre battue. « Vous aimez être dans la poussière comme un chien ? OK, je ne juge pas… », pestait-il encore l’année dernière. L’unique raison qui le poussera à être présent Porte d’Auteuil, en 2023, tient au fait que sa petite amie n’a jamais visité Paris… Notons que même le n°2 mondial, Daniil Medvedev, manquera une partie de la saison sur terre battue pour soigner une hernie inguinale. Mais on connaît son désamour pour la surface, et on peut penser que cela l’arrangerait presque de se faire soigner à ce moment précis de la saison.

Cependant, ce n’est pas la première fois que ce genre de choix s’impose auprès de certains joueurs qui n’ont pas d’affinités particulières avec la poussière de briques, comme on pourrait l’appeler. En 1990, Ivan Lendl (alorq n°1 mondial) avait décidé de ne pas disputer Roland-Garros ! Il avait pourtant remporté trois titres à Paris (1984, 1985 et 1987) et y avait été cinq fois finaliste entre 1981 et 1987. Mais il voulait privilégier Wimbledon, le seul tournoi du Grand Chelem qui manquait à son palmarès et dont il était obsédé. Un choix qui n’avait pas été gagnant, puisque Ivan Lendl s’était incliné en demi-finales au All England Club, malgré une préparation sur gazon débutée au mois d’avril. Plus près de nous, Roger Federer (n°44) avait également renoncé à la saison sur terre battue, en 2017, alors qu’il était en pleine forme. En début de saison, il avait remporté l’Open d’Australie et les Masters 1000 d’Indian Wells et de Miami, dans la foulée. Le Suisse souhaitait alors s’épargner les échanges sur terre battue pour privilégier Wimbledon. Grand bien lui en avait pris, puisqu’il s’était imposé au All England Club pour la huitième fois de sa carrière. Notez que le joueur helvète avait déjà fait ce choix en 2016, mais il était diminué ; choix qu’il renouvellera en 2018.

Ce genre de choix, seule une catégorie de joueurs peut se le permettre : les membres du Top 100, qui ont déjà bien assez gagné leurs vies grâce au tennis. Federer, Murray, Kyrgios… On voit bien qu’ils n’ont aucun problème financier, ce qui leur permet de s’éloigner des courts pendant deux à trois mois sans le sentir au niveau du portefeuille. Quand on est classé autour ou au-delà de la 150ème place mondiale, ce n’est plus la même affaire. Même si on n’aime pas la surface ocre, on doit alors se forcer à aller y jouer, pour engranger les points et surtout les prize money. Un deuxième tour à Roland-Garros, à titre d’exemple, peut sauver la saison de certains joueurs. En effet, un joueur qui passe le premier tour Porte d’Auteuil touchera la bagatelle de 84 000 euros. Alors, autant faire tout son possible pour au moins remporter un match sur la terre battue parisienne, en se préparant lors de la tournée européenne ! Enfin, on peut comprendre le choix de certains joueurs, qui sont plutôt des sprinteurs que des marathoniens, de ne pas jouer sur ocre. L’exemple de Nick Kyrgios est le meilleur pour illustrer cela. Son pourcentage de victoires est le plus faible sur terre battue : 54,3% avec 25 succès pour 21 défaites sur l’ensemble de sa carrière, avant le tournoi ATP 250 de Houston, cette semaine. Adepte des échanges courts, il se retrouve rapidement en difficulté sur ocre, parce que les échanges durent plus longtemps et qu’il faut construire le point avant de le conclure. D’autres joueurs auront également des problèmes techniques, comme Daniil Medvedev. « Il joue trop à plat », a analysé Patrick Mouratoglou. « Sa balle laisse trop de temps à l’adversaire sur terre battue et il ne peut pas appliquer ses tactiques habituelles. Son excellente vision du jeu ne suffit plus. Il aime se servir de la vitesse de la balle adverse, or cette balle va moins vite sur terre et il perd encore un atout dans son jeu. » Andre Agassi connaissait le même problème mais, en 1999, année de son triomphe à Roland-Garros, il avait su arrondir ses trajectoires pour enfin s’imposer.
Article rédigé par Yannick Giammona
Crédit photos : @rolandgarros, @mensclaycourt
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