Reportages

Peng Shuai, l’enfant terrible du tennis chinois ?

L’ancienne n°1 mondiale en double, Peng Shuai, vit une période bien délicate depuis qu’elle a accusé l’ancien vice-premier ministre, Zhang Gaoli, de viol. D’abord introuvable, puis apparue sur des photos et des vidéos où elle ne semblait pas à l’aise, il ne faut pas oublier que la Chinoise, dès le début de sa carrière, a toujours voulu être libre et insoumise. Ce qui a du mal à passer dans un pays comme la Chine.


On ne sait pas exactement où elle se trouve mais depuis quelques jours, on peut la voir partout. Samedi dernier, Peng Shuai était à table, devant un verre de rouge et des amis très gentils (dont un a tout filmé). Dimanche, Peng Shuai était à un tournoi de tennis, à lancer des balles aux enfants et des sourires aux puissants (dont un a tout photographié), puis elle était en visio-conférence avec le président du CIO pour une autre rencontre improvisée. « Je voudrais passer du temps avec mes amis et ma famille. J’aimerais que l’on respecte ma tranquillité », a-t-elle d’ailleurs déclaré. Ce que l’on sait encore moins, c’est ce qu’elle fait et qui elle est devenue, contrainte d’afficher une image qui n’est pas la sienne en temps normal. Car, à travers elle, c’est une vérité que le monde entier recherche. La vérité sur un viol attribué à un ancien vice-premier ministre, aujourd’hui septuagénaire, et sur les conclusions que pourrait en tirer, au XXIe siècle et à l’ère de l’homme bon, le régime politique chinois – qui se contente pour l’heure de nier la disparition de Peng Shuai ou toute autre mesure de rétorsion.

Depuis ses premiers pas sur le circuit professionnel, Peng Shuai refuse de lâcher prise. Elle a toujours été portée par une envie de réussir mais, en public, elle s’en ouvrait peu, poings fermés et mâchoire serrée, colères rentrées. Cependant, à cette époque, les commérages de machine à café la disaient déjà insoumise. La Suissesse Timea Bacsinszky, qui l’a affrontée trois fois, confirmait cela. « Elle était assez discrète, très gentille », a-t-elle expliqué. « Les Chinoises parlaient plutôt mal l’anglais mais Shuai Peng l’a vite maîtrisé. Aux vestiaires, elle discutait volontiers. Elle était reconnaissante à la Chine de financer sa carrière mais elle se plaignait du contrôle sur sa vie, notamment le blocage des réseaux sociaux. » On l’a dite endoctrinée par un coach taïwanais anticommuniste à l’âge de 18 ans, le temps d’un stage en Floride – une première pour une Chinoise. A peine rapatriée, Peng Shuai a menacé de quitter la grande armée des cogneuses en jupettes et a créé un esclandre en conférence de presse. « Regardez ce t-shirt Nike. Je suis obligée de le porter car la Fédération a passé un accord global », confiait-elle alors. « Mais moi, je n’ai rien signé, et je ne touche pas un centime pour porter cet équipement. Je voudrais pouvoir disposer de mes gains et partir m’entraîner en Floride. » Sans doute avait-elle payé cette audace de quelque privation. « Elle était souvent blessée », a fait remarquer Bacsinszky. Longtemps absente, déjà. Mais à l’époque, personne ne cherchait la vérité.

Issues de la filière académique, les joueuses chinoises partageaient tout: leur temps, leur argent et leurs secrets. Elles vivaient ensemble, deux par chambre, murées dans le silence. Pour sortir de cette monotonie, Na Li a fini par épouser son coach, ce qui lui a donné le droit de partager sa couche. Zheng Jie l’a imitée un an plus tard. Pas Peng Shuai. Les Chinoises faisaient du tennis, à défaut d’y jouer – car ce n’était pas une partie de plaisir, même si l’intention y était. Elles reversaient leurs gains au gouvernement qui, en échange, s’acquittait des frais – beaucoup d’argent pour des chambres à deux lits et des repas précuits à la cantine. « Mais le gouvernement nous verse une prime en cas de bonnes performances », avait précisé Zheng Jie, autre joueuse chinoise, dont la donation « spontanée » aux victimes du tremblement de terre du Sichuan, quelques années plus tard, fut accueillie comme la preuve manifeste d’une générosité folle, totalement folle. Na Li, vainqueur de Roland-Garros en 2010 et 1,4 million de dollars de gains, n’avait pas encore accumulé assez de primes pour acheter « un joli sac à main. » De son amie Zheng Jie à sa grande rivale Na Li, dont elle rejetait la domination autant que l’extravagance, Peng Shuai fut la première à prendre des libertés. Peut-être parce que rien ne lui fut donné : opérée du cœur à 12 ans et proche de devoir arrêter, enfermée dans un rôle de prodige à 20 ans et pas loin de fuir. « Son manager la désignait comme la prochaine Sharapova », s’est souvenu Timea Baczinszky. Comme tout le monde, l’ancienne joueuse suisse s’inquiète pour elle et son avenir : « Je ne sais pas ce qu’elle est devenue mais je l’ai suffisamment côtoyée, je l’ai connue assez sincère et vraie, pour penser que son histoire n’est pas du pipeau. Oui, je voudrais bien savoir où elle est en ce moment. » Alors, à quand toute la vérité sur cette affaire ? #FreePengShuai

Crédit photos : @BFMTV, @NYDailyNews

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