Au terme d’une semaine où il n’aura connu que très peu d’écueils, Daniil Medvedev (n°4) s’est imposé sans forcer son talent face à Alexander Zverev (n°6), trop souvent attentiste. Le Russe poursuit son incroyable ascension, commencée début août à Washington. L’Allemand, qui menait 4-0 dans ses confrontations avec son rival du jour, ne s’est jamais remis d’une fin de premier set calamiteuse.
« Tu es probablement le meilleur joueur du monde en ce moment. » Lors de la cérémonie de remise des trophées, Alexander Zverev (n°6) a voulu féliciter son bourreau du jour. Mais l’Allemand a visé juste, Daniil Medvedev (n°4) joue actuellement le tennis de sa vie et Zverev n’avait certainement pas les armes pour inquiéter durablement son adversaire. D’entrée de jeu, le numéro six mondial a montré des intentions de jeu contraires à un joueur conquérant. Malgré sa volonté de ne pas ouvrir trop rapidement les angles à l’échange (en s’efforçant de jouer à plat au centre du court), il se retrouvera trop souvent loin de sa ligne de fond pour tenter d’inquiéter le dernier finaliste de l’US Open.

Cette semaine, au moment de jouer des balles de break, l’Allemand s’est retrouvé en moyenne plus de deux mètres derrière sa ligne de fond.
ENTRE ATTENTISME ET MANQUE D’INSPIRATION
En se retrouvant loin derrière sa ligne de fond, Zverev facilite le jeu de son adversaire. Le plus souvent campé sur sa ligne, le Russe prend l’avantage dans ce match en menant 3-0. En panne de premières, loin derrière sa ligne et avec Medvedev qui rate peu, Alexander Zverev doit trouver des solutions avant qu’il ne soit trop tard.
En voici quelques unes :
- De fréquentes montées au filet pour briser la routine de jeu du Russe. En effet, ce dernier aime jouer de longs échanges pour s’installer dans un match. En interrompant les échanges par des montées « classiques » ou à contre-temps, il obligera le Russe à s’ajuster. Toutefois, depuis le début de sa carrière, Zverev n’est pas un adepte du jeu au filet.
Ce qu’il s’est réellement passé : L’Allemand s’est rué au filet à de rares reprises. Le peu de fois où il s’est présenté au filet, c’était dans de mauvaises conditions : attaque pas assez longue ou encore des volées mal ajustées. Il a également subi la qualité des passing-shots du Russe, secteur de jeu en nette progression depuis août.
- Des amortis : Alexander Zverev en a abusé de manière trop sporadique pour pouvoir faire un bilan complet de cette phase de jeu bien spécifique. Pourtant, les rares fois où il a utilisé cette arme, il a pu finir les points en deux temps. Une application plus fréquente lui aurait peut-être permis d’augmenter son ratio de points gagnés dans ce match (43 sur 105 points joués).
Au moment où Zverev réalise cet amorti, Medvedev n’est plus sur ses appuis. Le Russe effectuera une course vers l’avant mais son coup droit sortira en largeur.
- Enfin, le slice court : Parfaitement maîtrisé par Roger Federer (n°3), la réussite de ce coup n’est pas donnée à tout le monde. Zverev l’utiliserait pour obliger Medvedev à se retrouver dans une position complexe, entre retourner vers sa ligne de fond en reculant ou monter au filet dans des conditions désavantageuses. En effet, si le slice court est bien réalisé, le protégé de Gilles Cervara doit déployer sa grande silhouette longiligne afin de passer le tamis de la raquette sous la balle.
Ce qui s’est réellement passé : L’application de ce coup de la part de Zverev a été beaucoup trop aléatoire pour porter préjudice à la confiance inébranlable du Russe. Par exemple, dans le deuxième jeu du match, Zverev a la possibilité de rentrer dans le court et jouer le long de la ligne. Cependant, il décide (de manière incompréhensible) de jouer un slice de revers trop court, permettant à Medvedev de revenir dans l’échange. Autre cas de figure, grâce à un bon slice court, Zverev peut rentrer dans le terrain, Medvedev est sur le reculoir. L’Allemand est en position idéale pour jouer un coup droit penalty, facile à exécuter pour un joueur de son niveau mais il part à la faute en largeur.
En somme, les solutions ont été relativement bien identifiées par l’Allemand mais leurs réalisations ne lui ont pas permis de renverser la vapeur dans ce match. Malgré son retour à trois partout dans le premier set, suite à un mauvais jeu de service du numéro quatre mondial, Zverev s’est appuyé sur des jeux de services lui permettant de récolter des points gratuits.
LE RUSSE S’ENVOLE
A 5-4 dans le premier set, Medvedev a élevé son niveau d’un cran. Les deux premiers points remportés dans ce jeu fatidique l’ont été à l’issue de longs échanges gagnés par le mur moscovite. En revanche, il n’a pu dû s’employer sur les deux points qui suivirent : deux doubles fautes et Zverev offre sur un plateau le premier set à son adversaire. Ces moments de flottement auront été déterminants dans ce match puisque dans le deuxième jeu du deuxième set, Zverev mène 40-0 sur son service. Il commet à nouveau une double faute à 40-30 permettant au joueur formé à Cannes de revenir à égalité dans ce jeu. Il finira par breaker quelques secondes plus tard. Le Russe s’envole, l’Allemand ne reviendra plus. A noter qu’Arnaud Clément relevait aux micros d’Eurosport pendant le match que le cadet des frères Zverev commettait beaucoup de « fautes de filet », symptomatiques d’une crispation présente tout au long du match. Dès lors, avec un set et un break en poche, Daniil Medvedev à la manière des plus grands, enfoncera son adversaire, ne lui donnant aucune possibilité de débreaker. Au moment de convertir des balles de break, Medvedev surfe sur « son sentiment d’invincibilité » pour en convertir 4 sur 5 et en sauver 5 sur 6 disputées.
En résumé, le match d’Alexander Zverev aura été beaucoup trop irrégulier pour pouvoir réellement remettre en question la domination du Russe. Au contraire, Daniil Medvedev aura été impérial dans les moments cruciaux du match, symbolisés par sa réussite sur balles de break. Sa confiance et sa sérénité du moment pourront lui être utiles à Paris et Londres, lieux des deux derniers tournois majeurs de l’année afin d’étendre sa mainmise sur la deuxième partie de la saison. Car oui, depuis le mois d’août, c’est bien lui le meilleur joueur du monde.
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