Corentin Denolly est un jeune joueur français, seulement âgé de 21 ans. Si vous ne le connaissez pas encore, nous vous proposons de le découvrir à travers cette interview. Pour notre part, nous l’avions découvert en 2018, à Roland-Garros, quand il avait joué les qualifications. Nous avions pu voir un jeune joueur plein de rage de vaincre, d’envie et de détermination. Voilà le souvenir qu’il nous a laissé. Aujourd’hui, Corentin est en plein boom. Il ne cesse de progresser. Après avoir remporté son premier titre sur le circuit ITF en 2016, il vient de soulever son cinquième trophée il y a un peu plus d’une semaine du côté de Monastir, en Tunisie. Désormais classé 45ème à l’ITF (il est 427ème au classement ATP), il devrait pouvoir s’aligner bientôt sur le circuit Challenger. Partez avec nous à la rencontre d’un jeune homme qui a la tête sur les épaules et pourrait peut-être faire partie de la relève du tennis français dans un futur pas si lointain…
Bonjour Corentin, vous avez remporté votre cinquième titre ITF à Monastère il y a un peu plus d’une semaine, qu’avez-vous ressenti au moment de la victoire ? La finale était difficile si on en croit le score, non ?
Bonjour. Oui, le match était difficile contre un joueur qui est en pleine confiance et qui joue très bien. Lors de mon dernier titre, je l’avais déjà battu en finale. Je savais à quoi m’attendre et comment le jouer. C’était un match vraiment difficile, d’autant plus que je sauve quatre balles de set au tie break du premier set, que j’arrive à accrocher 12 points à 10. Le ressenti était vraiment beaucoup de bonheur. J’avais enchaîné des tournois avec des défaites, un avec des scores accrochés, mais avec un bon niveau de jeu. Donc pouvoir contrer cette spirale négative, seul sur ce tournoi, c’est d’autant plus satisfaisant.
Aviez-vous déjà rencontré cet adversaire, Skander Mansouri ? Comment a-t-il réussi à vous gêner tout au long de la partie ?
Je l’avais joué en finale d’un 25 000 $ au Cameroun, où j’avais gagné en deux sets accrochés. C’est un joueur qui a une grosse qualité de frappe, qui sert très bien, qui peut vous mettre à trois mètres de la balle sur un coup. Donc, il est un joueur assez dur à manœuvre.
Fait étrange du circuit ITF, vous étiez tête de série n°3 la semaine de votre titre à Monastir mais la semaine suivante, vous avez dû passer par les qualifications pour pouvoir à nouveau faire partie du tableau principal de ce tournoi. N’est-ce pas trop difficile de devoir jouer deux matchs supplémentaires, qui plus est après une finale, pour enchaîner les tournois ?
Pour l’anecdote, j’ai même fait des pré-qualifications que j’ai jouées après ma demi-finale et après ma finale. Je n’étais pas inscrit cette semaine-là (un oubli de ma part). Du coup, mon seul moyen de jouer ce tournoi était de passer par des pré-qualifications pour obtenir une wild card pour les qualifications. C’était ça ou rien, donc je m’étais préparé à faire des matches en plus, ce qui ne me posait pas de problème.
D’ailleurs, quel regard portez-vous sur les changements qui se sont opérés cette année sur le circuit ITF et le circuit Challenger ? Cela simplifie-t-il la vie des joueurs ou est-ce le contraire ?
Avec ce changement ce qui est évident, c’est que cela va mettre beaucoup de joueurs sur la touche, étant donné le nombre limité de joueurs ayant accès aux qualifications. L’accès est assez restreint. Idem pour les Challengers où le nombre de joueurs est limité.
De par ces changements, vous devez composer avec deux classements (ITF et ATP). Vous êtes bien classé à l’ITF, ce qui devrait vous permettre d’accéder aux tournois ATP en commençant par les Challengers. Cette progression avec deux classements vous convient-elle ?
Oui, de toute façon je suis obligé d’en passer par là pour pouvoir faire des Challengers et améliorer mon classement ATP. C’est un petite gymnastique de programmation qu’il faut prendre en compte.
Vous sentez-vous prêts à passer à la catégorie supérieure dans les mois à venir et à tenter votre chance sur des Challengers, ou la concurrence est plus rude ?
Oui, je me sens prêt. Je vais continuer à jouer quelques tournois ITF encore, pour assurer ma place dans les Challengers pendant une bonne période. Je sais que j’ai le niveau pour bien jouer en Challengers, donc je suis impatient de pouvoir les enchaîner.
Avec qui vous entraînez-vous ? Avez-vous un entraîneur qui vous suit au quotidien sur les tournois, ou vous entraînez-vous avec d’autres joueurs (français ou étrangers) sur place ?
J’ai la chance de m’entraîner au CNE (Centre National d’Entraînement) de la FFT. Je suis dans un groupe avec cinq autres joueurs, et encadré par deux coaches : Augustin Gensse et Jerôme Potier, plus un préparateur physique. Le suivi de tournois va dépendre de ceux auxquels nous participons, de la période, si les autres joueurs jouent également donc cela varie de semaines en semaines.
Il y a quelques jours, une affaire a fait grand bruit dans le tennis français : les matches truqués. Avez-vous déjà été approché, et si tel est le cas, comment avez-vous réagi ? Que pensez-vous du fait que certains joueurs puissent craquer et se laisser prendre dans les filets des parieurs ?
Je n’ai été approché qu’une seule fois quand j’étais au Cameroun. J’ai tout de suite prévenu le juge arbitre qui a alerté le TIU (Tennis Integrity Unit). Ensuite, dans la journée, j’ai reçu un questionnaire de leur part que j’ai dû remplir pour expliquer la situation et m’innocenter. Le tennis est un sport qui coûte cher, donc quand on te propose des grosses sommes d’argent, quand tu en as besoin, c’est un gros dilemme qui s’amène devant toi.
Finissons sur une note un peu plus personnelle. Rencontrez-vous parfois des difficultés dans votre métier de joueur professionnel (financières, humaines ou autres) ?
Comme je l’ai dit, j’ai la chance d’être suivi par la FFT donc financièrement, c’est une aide non négligeable. Après, la vie de joueur de tennis est top par moments car on voyage et on découvre des cultures, des pays, grâce a notre sport et en faisant ce qu’on aime, donc c’est un plus. Après, c’est vrai qu’il faut faire des sacrifices comme avec la famille, qui est un soutien inconditionnel et qu’on ne voit pas assez souvent car on es en déplacement. C’est une vie que j’aime bien, donc je ne me plains pas.
Comment gérez-vous votre vie au quotidien ? N’est-il pas trop lourd de voyager tout le temps et d’être loin de chez soi une grande partie de l’année ? Est-il facile de se faire des amis, de créer des liens avec les gens qui vous entourent sur le circuit ?
Personnellement, tous mes meilleurs amis sont des joueurs de tennis. On partage la même vie. Et j’adore voyager. Pouvoir découvrir des pays tout en faisant son métier, c’est le kiff !
Pour finir, quelles sont vos craintes en tant que joueur professionnel ? Et quelles seraient vos envies ?
Je ne sais pas si j’ai des craintes précises mais comme tout sportif, la blessure est toujours une crainte qui peut arriver à n’importe quel moment. Sinon, mes envies bien sûr sont de continuer de progresser au classement et pouvoir enchaîner les bons résultats.
Merci Corentin d’avoir accepté de répondre à nos questions, nous vous souhaitons le meilleur pour la saison 2019 !
Propos recueillis par Yannick Giammona pour « Jeu, Set Et Match »
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